24 juin 2007

Lecture de Poésie ce 25 juin 2007 à la Plage.


Voici, un peu en retard..., l'affiche pour la soirée de demain.
La saison se termine et nous serons là pour le plaisir...
Venez nombreux, musique et Poèsie au rendez-vous...

17 juin 2007

Exercice de Visions


Tout ce que tu sais de ta vie, c’est qu’elle n’y habite plus.
- Tu as joué, tu as perdu.

- Là-dessus, tout le monde s’entend.
- Le problème, c’est une affaire de prisme. Tu l’as regardée partir, tu te rappelles la scène, mille lueurs l’inondaient, mais tu ne distinguais pas leurs sources. Ca se complique.

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Journal de bord de Lillo

J'ai peur. Il y a cinq mois, une autre comme moi, mais très vieille, m'a fait naître: elle a soufflé pendant quelques minutes, … soufflé fort sur moi. Ainsi, depuis cinq mois, petite particule installée dans ce corps silencieux, j'avance, perdue, à travers lui… Continuellement, je dois subir la présence de l'hémoglobine et des différents organes : je sens bien qu'ils me détestent ! J'avance et attends de rencontrer un de ces lymphocytes T4, « nos seules et uniques victimes » m'a-t-on dit. La force s'acquiert dans le devenir. Si jeune, la petite particule que je suis aimerait même l'aider plutôt que de le détruire ce corps.

Aujourd'hui, ce corps m'a pleuré son identité. De cette personne, j'entends la voix. Elle s'appelle Corie. Je le sais puisqu'elle a relu à voix haute des lettres reçues d’un ami. Une d'il y a quinze ans commençait ainsi:

«
Le 24 janvier 1980,
Corie, écoute-moi, Corie! Je te vois samedi mais lis mes quelques lignes de ce soir. Poursuivons notre tour du monde livresque et épistolaire de l’année 1979. J’entre dans la nuit après avoir lu un livre sur les Kerguelen et je conduis pour toi ma main écrivant sur les traces de mon lointain voyage. Je veux être l’intermédiaire de ce portrait de paysage austral et français. Connais-tu cet archipel - baptisé les îles de la Désolation? […]
»

Nathalie Rousset
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Premier départ

[…] Il s'installa au bar et entreprit d'écrire. Il écrivit vite, sans rature, sans se relire, sûr de lui-même, sûr que ce qu'il griffait-là venait de son noyau le plus vrai, le moins touché par l'extérieur, le moins influencé par les lectures, les avis, les doutes et les reproches. L'être brut de ce qui le composait. La nature mystérieuse de ses désirs d'ailleurs s'offrait ainsi à la feuille de son carnet noir après tant d'âpres combats. Il récoltait les phrases qu'avaient semées ses actes. Il tournait les pages rapidement, passant de l'une à l'autre sans hésiter, presque sans réfléchir… "On ne demande pas qui donne, on prend et c'est tout." Il continua ainsi, fumant abondamment, haletant comme une bête en pleine course. Il était la Bête de Somme aux velléités d'Aigle. Il se parlait à lui-même, oscillait de la main comme le chef d'orchestre tendu de ses émotions. Il contemplait les étourdissements faits mots qui déboulaient en hordes désorganisées, furieuses, prêtes à tout pour parvenir au Sens, même à le détruire lui et tout ce qu'il ne représentait pas encore. Il prit conscience du danger immense que représentait sa recherche du Sens, comme on prend conscience de la mort au moment où la balle pénètre l'ossature du crâne. Il vit tout ça en une demi-fraction de seconde qui dura l'éternité de la vérité qu'il venait de sentir. Il la ressentit dans son corps, comme un électrochoc sur le velours rouge de sa jeunesse. Il avait vu la Chose. Dès lors, sa quête prit l'allure d'un forage du corps, d'un dévoilement du Sens, sans pitié, plus que la recherche d'une maîtrise quelconque.

Charles Letellier
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Sur la neige

La nappe blanche s’est emparée du paysage. Des traces de pas s’entremêlent, empreintes d’un passé récent. La neige achève de les estomper. J’ai le sentiment de les avoir rêvées. Autour de moi les flocons forment une symphonie, s’agencent splendidement à la nature déboisée. Tout semble maintenant se cristalliser, comme s’il ne fallait qu’une légère secousse pour casser cette fragilité. La lumière est franche.

Je poursuis mon chemin malgré l’onglée qui me crispe les doigts. J’aimerais aller le plus loin possible, jusqu’au bout de ma fatigue ; tenir, jusqu’à l’épuisement. On n’aura plus qu’à me recueillir inanimé, sans explications.
Sur le bas-côté de la route, un gitan sort de sa roulotte, le visage tuméfié, une large cicatrice sur le front, les vêtements légers malgré le froid. Il fait semblant de ne pas me remarquer. J’ai le sentiment étrange d’appartenir à son monde. Sur son visage on sent les graves périls qu’il a traversés : esprit exilé d’un autre monde qui vient errer dans celui-ci. L’étonnante route qui m’a conduit jusqu’ici ! Il m’a fallu quitter le monde pour me retrouver enfin face à moi-même. Connaître par cette rencontre mes désordres intérieurs, et apprendre à les apprivoiser. Par les liens de l’esprit, j’appartiens aux déracinés, gitans sans famille ni attaches, ni possession ni logement. Je sens se déployer leur histoire au plus profond de moi. Leurs chants nocturnes me bouleversent au suprême ; ces chants tourbillonnants, beaux et graves, qui me révèlent au-delà de ce que je puis être.


David Falkowicz
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14 juin 2007

Textes

Les extraits de textes du dernier numéro seront bientôt disponible... En peu de patience...

Sortie du nouveau numéro d'Ananda. Edito.




Le pas du funambule


Au sommaire de ce troisième numéro d'ANANDA, "le monde comme représentation". Rien que ça… Mais oui, parfaitement. D'aucuns prétendent qu'il y faut de la thèse pour aborder ces questions. Et un doctorat es excès pour évoquer la vie, ça vous va? "Le monde comme représentation", il n'y a qu'à se pencher, dans le corps, pour y trouver les pistes salutaires, pour y cartographier l'étendue viscérale de nos propres errances. Errances étendues d'un monde dont la représentation tente de s'achever. "Le début du monde finit commence" écrivait Valéry, il y près de 80 années. Au pas de charge, la Planète Auschwitz se met en place. Et le pas du funambule, aérien, par-delà les contingences et partisan de personne, méprise le filet s'il doit risquer sa vie. Et accomplir en silence le travail de la défiance…

Alors, voilà le programme: l'errance silencieuse d'une panthère noire sur la neige, les exercices de discernement d'un feu affolant, la routine meurtrière d'une cellule innocente et l'évasion d'un fou d'authenticité où la quête du Sens passe par la confrontation au monde. Autant de textes entrecoupés du souffle de deux nouvelles plumes dans la précision de la poésie.

L'écho des mots se fait dans le miroir des désordres du monde. Ils sont peut-être la réponse du Sens au Non-Sens nauséabonde qui règne ici et là, entre les Nouveaux Prophètes qui ont tout vu et tout compris et les autres dont on est sûr que ce n'est pas le cas.

Extase immobile et silencieuse, volonté d'extraction de la vérité, l'urgence de percer le mur de nos représentations devient vitale. Et tout est bon pour rejoindre l'autre côté, quelque soit la profondeur du gouffre et la minceur du fil. C'est là-bas…Le meilleur moyen est encore de s'y rendre à cloche-pied, la raison titubante…
On y va?


Charles Letellier,
Mai 2007.