7 mars 2007

EDITO - La fleur de Lotus

A travers les styles et les textes qui sont proposés ici, les auteurs ont décidé d’engager sérieusement les hostilités contre la flasque tiédeur des littératures ambiantes qui ne savent danser – Et encore ! – que devant une caméra et qui jamais ne pensent, jamais ne poussent le Mot dans ses retranchements les plus lointains, les plus hostiles à la sourde logique des grammatistes, jamais ne l’utilisent comme l’intermédiaire excellent qu’il est, entre le mystère ineffable du monde et de la vie et la force et la démesure de l’esprit humain.
C’est tellement demander aujourd’hui que d’inciter à l’effort ! Que rien ne soit dur surtout ! Qu’on nous donne et nous redonne du Marc Levy ! A la pelle ! Parfait ! On n’a jamais vendu autant de livre ! La littérature va bien merci. Elle pue la mort mais elle revêt de belle parure et son maquillage imite, mieux que n’importe quoi d’autre, la vie… Les sens deviennent incompétents tellement leur usage est déprécié et les écrits d’aujourd’hui sont le miroir de ce constat. Rien ne permet de grandir l’âme du monde en nous, tout est réduit à une espèce de néant organisé par la science dans lequel fusionnent des particules incandescentes et incontrôlées. Mais c’est un risque que de voir ces particules contaminer l’ensemble des cerveaux ou, du moins, quelques-uns des cerveaux de ce monde. Risque que ne peuvent se permettent ni les dirigeants politiques ni les responsables des maisons d’éditions toujours plus près de leur exigence de « rentabilité » et toujours plus avares quant à leur goût.
Ananda prend l’autre parti (et aussi le parti de l’autre), celui de l’exigence et de l’effort, celui aussi d’une certaine cruauté face à la mièvrerie aseptisée des médias qui, bien plus qu’une tyrannie déclarée, permettent un contrôle aigu des êtres et de leur cerveau en provoquant et en entretenant la peur que le monde, en plein bouleversement, inspire à juste titre.
Chaque jour est à transformer. Ne jamais oublier ça. « Lorsque l’intensité est la mesure des actes quotidiens, la quotidienneté disparaît. » (M. Moreau) Et si la quotidienneté disparaît, avec elle trépasse la médiocrité et l’aigreur du train-train d’ban-ban où s’écoule et se déverse une masse toujours plus abrutie de travail et assoiffée d’une liberté en pension complète à 300 euros la semaine. Nous vivons dans une amnésie salutaire qui nous fait oublier que sous la fleur de lotus, dix tonnes de boue s’accumulent, qui la rendent encore plus sublime.
Et le Verbe est cette fleur de lotus, il est une géologie inversée, remontant à la surface pour tenter de la comprendre ; c’est aussi le messager viscéral des intestins à la fascination scatologique de l’humain. Ananda, enfin, je le redis, travaille à cet effet, sur le Rythme, la Mélodie et le Style que les mots contiennent parfois et qu’ils devraient incarner, toujours.
Pour changer la vie, comme disait l’autre…


C.L. Octobre&novembre 2006

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