26 mars 2007

Le métronome

Les jours avancent en métronome
Et donnent à revoir le mode saccadé qui est le mien.
La cadence est régulière, le trajet aux abords de la droiture.
Le rythme organisé en une marche au quotidien.
Non pas la marche du quotidien : celui-ci va en cercle,
Incapable d'inventer la tangeante.

Métronome à rebours pour un métro de gnomes en contour.

Tic-Tac, Tic-Tac - L'urgence a commencé - Tic-Tac, Tic-Tac - Le bolide est acéré - Tic-Tac, Tic-Tac - L'urgence est consommée - Tic-Tac, Tic-Tac - Le métronome est balancé.

Balancée, la vie, accrochée à la base de la tige du métrognome, mesure intempestive des petits coeurs qui vibrent quand même.

Poésie des mots qui percent la neige qui recouvrait ma solitude.

Poésie des mots qui malgrè l'haleine puante de la bouche du métro arrive bien, encore, à faire bander mes sens en de précoces éjaculations d'encre bénines.

Poésie des mots qui bravent le danger de la norme-allitée, en alitérant les consonnances flamboyantes de la vie des sens.

Poésie des mots quand le train s'arrête comme une enclume de matière inerte...

Le 21-03-07

22 mars 2007

Soirée du 26 Mars 2007 à la Plage


Voici l'affiche de la lecture... Salud!

16 mars 2007

Hymnes Déchirés

Un nouveau recueil - Hymnes Déchirés - est disponible sur cette page. Je vous invite à cliquer ICI pour découvrir le premier texte...

Soirée du 26 Mars 2007 à la Plage

Suite au succés de la dernière soirée lecture organisée le 29 janvier dernier au Café de la Plage,
l'Association Vers De Rage réitére l'expérience le 26 mars 2007, même heure, même endroit (20h30 au 59 rue de Charonne, Paris 11ième, pour ceux qui ne suivent pas...)
Il y sera présenté les nouveaux textes qui figureront dans le 4ième numéro de la revue ANANDA et qui seront, une fois de plus, accompagnés par les rythmes souvent endiablés de Kamel Tenfiche de l'O.N.B. (Orchestre National de Barbès) ainsi que de Mohammed Nasri, flûtiste de renom.
D'autres surprises sont à prévoir et le vin et la spontanéité feront le reste...
Venez nombreux! avec vos potes, vos Femmes, vos Hommes, vos maîtresses, vos amants, vos chiens, chats, rats, migales, zébres, vos tires-bouchons, vos tripes surtout, vos oreilles, vos coeurs, vos coudes (ben oui...) en bref, avec vous-même!
En attendant, on se retrouve
ici, régulièrement, pour de nouveaux textes et des infos.
Salud!

Extrait d'Ananda consultable en ligne

Désormais des extraits de textes de la revue ANANDA sont consultables sur cette page... Bonnes éruptions...

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Hymnes Déchirés - Faim

XI
Faim

Je me désoriente volontiers
Pour subvenir à l’occasion de ma faim
Dire des choses vraies…
Accrocher des cornes aux nuages
Pour tenter d’approcher ce qui s’évite…

J’ai faim !

S’oublier ne sert à rien
Si l’on ne sait s’affronter
Et pourtant, je ne suis qu’à moitié
Plein d’un liquide amniotique,
Qui me reste entre les dents…

J’ai faim !

Bon Dieu que j’ai faim !
Et le divin vomit sûrement en moi…
Qui ne suis qu’à moitié,
Moitié d’un sommet et d’une cave
Période d’entre-deux incroyable
Moribonde furie exaltée…

J’ai faim !

A mi-chemin entre la horde et l’ivoire,
Entre poussière et fusion.
Je calque mon maudit organe
Sur les façades dégarnies
Des boulevards du malheur…
Où je n’arrive même plus à me noyer

J’ai faim !

Et il y a bien des fois
Où le ridicule ne me tue pas,
D’autres fois où il ne parvient pas
A tuer les autres…

Combien se persuade que c’est une sinécure… Merde !
Que l’on naît, comme ça, pour jouer…

Je suis un animal !…
Et ne suis pas à ma place :
J’ai bien trop de vie pour
Fracasser ma déraison
Et à force de s’essayer à la folie
On devient fou et puis tant pis…


Amiens, Paris, Montmartre
Entre Juillet et Décembre 2005, doucement…

Hymnes Déchirés - Un soir après la fête

Amiens

X
Un soir après la fête…


J’ai tout abandonné :
Les fanfares, les ronds d’serviettes,
Les sourires à moitiés,
Les ententes mesurés…

Tout

J’ai laissé des trésors factices
Pour embrasser de vierges
Contrées embrasées ;

J’ai laissé le foutre pour le souffle
Mais je n’ai dénigré ni l’un ni l’autre.
J’ai convoité le dédoublement
Pour rassembler ce qui s’éméchait
Férocement en mon sein antique.

J’ai vu double tandis
Que je buvais sextuplé.
Je me suis inquiété du tort,
Soucié de la cruauté—
Ne voulant pas croire.

Ah, qu’elle est belle la recherche…

J’ai quasiment
Tout sacrifié
A cela,
A cette incapacité
A être parmi vous…
Vous, vous, vous qui régnez !!

Et pourtant, j’ai mis mes pas
Jusqu’au sable de vos contrées ;
Je me suis abasourdis
De vos dires,
De vos femmes,
De vos alcools.

Pourtant, tout semble s’être passé,
Comme dans le songe
D’une nuit à rallonge.
Et c’est un peu comme l’amour
Qui s’éclabousse contre la paroi
Râpeuse de mon cœur,
Qui n’en peut plus d’aimer,
Qui en meurt parfois…

Aimer, aimer, aimer…
C’est un suicide peut-être…
C’est se mettre en joug…
C’est intolérable tellement c’est nécessaire!

On se lance des cordons qui parfois,
Par miracle,
Se transforment en perche,
Comme pour signifier que,
Enfin, ça y est,
Tout est figé, sécurisé, sous contrôle.

Et l’on voudrait me le faire croire !
Et trop de faiblesse m’y accule,
A cette maudite croyance !
Permets au moins que je te dénigre,
Cruelle mensonge !

Faiblesses destructrices, terrifiantes,
Telluriques, sismiques,
Qui tente le cosmique
Pour ne pas sombrer dans le comique…

Et j’en suis le jeune fruit pourri
A la fois, vert et brun,
Odeur d’insanité vitaminée…
J’excelle en l’art de transformer, de donner…
Je m’abreuve, mange,
Fourni la nourriture quand la discussion
S’étale, aide à couper les morceaux,
Montre que j’aime l’inconnue,
Croque serpents, ferraille, fleurs,
Tous ce qui est susceptible
De bien tenir ensemble,
Comme un damné, un furacle,
Je dessine les nausées
(rendez-les moi ce sont les miennes)
Et parjure les être surannés…

Hymnes Déchirés - Hymne déchiré

IX
Hymne Déchiré


Je suis bien seul et dérisoire.
Dérisoire ma notion d’aimer et de vivre.

Je suis le plus connecté…
Et le moins parmi vous !
Par quelle magie, cela est-il possible ?

Bien de ce monde ?!
Et comment ! J’l’connais, moi !

Des pucelles, des maquereaux,
Des loubards, des fuyards-menteurs,
Des connards sans faim qui s’accrochent,
Dégueulasses, aux baskets des chiens…

Et des gens biens, des fous,
Des tarés aux insoumissions infinies ;
Des fols-dingues sans entonnoirs,
Qui, si le cœur est inspiré,
Peuvent mordre en vampire
De fraîches chaires…
Attaches nerveuses,
Sens démontés comme un océan…
Vapeurs collantes de
Sang qui, doucement,
Coagule…

Ah ! Et sentir le frais sur sa gueule !
Car c’est bien là que les choses vivent :
Dans le sentir…

[Que tout ceci est brisé…Cela ne changera rien…J’ai mal partout]

J’aimerai n’écrire que de longs poèmes,
De grands hymnes dédiés à la Source,
Clairs, perçant, dansant… Au-dessus du cratère, l’éther…
Proximité des gouffres,
Je ne veux plus rien accepter. C’est fini.

J’ai été jusqu’au bout de la violence.
J’y suis encore. Je la dompte tranquille.
Ou bien : Est-ce que je la dompte ?
Elle est douce tellement je la connais.
Cette violence d’ambre…
Presque calme…
Non, je ne suis pas ivre…
Juste extra-lucide…

Hymnes Déchirés - Soudain et Irruption

VIII
Soudain

Voilà que d’un coup,
Ma voix m’a quitté et,
Loin de m’en défaire,
De m’en offusquer,
Je persiste dans la forage qui m’obsède.

Il y a encore à presser, allons !
Sur le pont, comme dit l’ami…
Mais, hier je suis allé trop loin :
J’ai percé et me suis aveuglé
D’une putain de beauté,
A moins que ce ne fût de la beauté d’une putain…


X
Irruption


J’ai commencé à boire le jour où j’ai eu une érection en contemplant le drapeau Français…

Hymnes Déchirés - De désarçonné au piquet

Ailleurs…

VII
De désarçonné au piquet

Désarçonné sans soupçon,
Recroquevillé parmi les moussons
Les fusions s’abreuvent
De pensées fumigènes…

Et je nage, compagnone…

La plupart des gens sont chiants
Il y en a d’autre, avenants
Qui ne peuvent donner que
Sur le sommet des diamants,
Sur la limite de la lame,
Sur le coupant de la vérité…

Oh, jour !
Ne perds pas tes amis cardinaux !
Réfléchis les cœurs
A la surface des eaux !

Je suis morne et recommence, encore.
Je suis ivre et veux livrer,
Peut-être un secret
Sauriez-vous écouter ?

Vous devriez m’empêcher
D’être moi-même,
Vous en viendriez, peut-être,
A le regretter…

Car, fort de mon être de pamphlet,
J’arrive et vous cloue au piquet

Hymnes Déchirés - Un tourbillon enchaîné

Sur une Butte en feux…

VI
Un tourbillon enchaîné


J’ai le diable de l’impatience
Qui me taraude, qui me colle à la peau,
Qui me suis comme mon ombre,
Qui tente d’extirper du moindre de mes mouvements,
Un geste de grâce…

Un geste de grâce, parfois,
A l’improviste au milieu de nuits brunes…
Mais, toujours furtif,
Il ne laisse qu’une trace
Dans le chaos prémédité
Où j’aime à me jeter.

C’est une furie immobile
Qui a besoin d’une prise.
Une prise pour s’arracher à son idiotie
De n’être, parfois, qu’une furie…

On me dit d’être calme, mieux, d’être patient…
C’est sans doute vrai, il le faudrait…
Je le devrai, un jour.
Pour le moment, je suis traversé de rayons brûlants
Et de mes narines se déversent de la fumée rouge,
Comme un signe de danger…

Ah, Diable ! Que l’on scrute le fond de ma paupière…
Et que l’on me dise—Osez, allez-y—
Que véritablement,
C’est la solution.

Je suis comme le sommet
D’un tas de monstres de gigantesques.
Je cours parmi eux
Quand le jour a fini de m’irriter,
J’y ramasse là une rose, ici du pavot.
Là encore, j’y trouve le moyen
D’appesantir mon regard et d’aligner mes pas

Mais, hélas, bien peu de preuves pour les mirauds !
Et ne seraient-t-ils légions et moi inhumain,
Que je me contenterais d’arrêter là
Et de dire « à bientôt ! »
Et de me casser la tête contre
Un zinc flamboyant où
J’aurai bu suffisamment d’engeance tannée
Pour me réconforter du sort des marauds…

J’ai rêvé de nombreuses fois
Attraper cette foutue clé de charité,
Il me semble même qu’une fois,
Elle a glissé de ma main de rocaille.

J’y mets du mien, vous savez
Et tout ce qui pue avec le reste !
Mais je n’y suis pas pour rien… Non…
Au contraire, je revendique mon ordure !

C’est moi, et à défaut d’en être une, totalement,
Je puis vous assurer Messieurs,
Que j’en fabrique, en consomme et l’adore !
Foutue ordure !

C’est vrai, j’ai voulu m’aveugler de la terre.
Je l’ai courue désespéré,
Au point d’en être vraiment heureux, par moment.

Quelle idée ! Un fort contenant mérite son fort contenu.
Il le cherche et se passionne de sa quête.
Il s’aligne sur des cieux en profondeurs,
Sur des odeurs de diable.
Qu’y aurait-il d’autre à faire pour ce furieux encorné
Que de courir en haut et en bas, à tenter de dénicher un passage ?

A vrai dire, la question n’est même pas posée…

Hymnes Déchirés - Abreuve-moi

Au sein du pot de miel,
Doux-amer…

V
Abreuve-moi


Je n’aurai jamais le savoir-faire
Mais toujours le sentiment
Buste à l’horizon qui n’est pas loin
Abreuve mes pas,
Je te convie
Et te renie…
De n’être pas

Hymnes Déchirés - Néant acide

Au bord du gouffre, un soir…

IV
Néant acide


Mon cœur doit être bien malade
Car jamais il ne se satisfait,
Jamais, il ne convient
D’autre, impénitent, n’oserait
Peut-être pas se poser la question

Moi, je me la crie et
Voilà que tout se brise à nouveau…
Tout se dissipe, s’enchaîne, se montre,
S’obscurcit, s’emmêle,
Part déjà, part encore, part toujours…

La même histoire toujours,
N’y aurait-il plus de différence ?
« Le début du monde fini commence »…

Le monde a besoin de crucifiés.
Voici venir le siècle du bouc—
Point de sable ni d’eau au-dedans—
Epouvantail mourant sous des vapeurs d’eau acide…
Bouzkachi terrifiant…
Et derrière, derrière…
Sur cette roche millénaire, au fond,
Recouverte du miel de l'immortalité,
L'explosion la plus silencieuse
du grand grand mystère...

Hymnes Déchirés - Odeurs de diables

Un après-Midi,
Chez Robert,
Rue Blanche
.

III
Odeurs de diables



Des odeurs de Diables… !
Ah, si seulement l’odorat pouvait s’y suffire !
Mais, non ! Il appelle
L’attitude et les mots et la démarche.
Nul besoin d’hésiter si l’on sait. Pas vrai ?

La cadence est donnée :
je serai fou la nuit et ivre le jour…
Et surtout, orphelin des pleurs et des demis-sourires.
Il n’y aura rien que je ne puisse faire
Sauf de me défaire doucement, graduellement,
Par palier ; Par dégoût ?

A donner sans péril, on succombe sans vaincre…
Je reste songeur.
Me voici de retour là où tout est parti…
Et j’y reste, prétendant y creuser un fossé abominable,
Où je pourrais tout mettre, définitivement.
Mais le pire n’est pas là !
Le pire, le voici : Tous ont une pelle à la main
Et tous me la tendent !
En signe de reconnaissance, d’humeur,
De plasticité moribonde, d’amitié, même !
Voire sous l’horrible couvert de l’amour…
Ils s’y mettent tous…
Ah, ah, ah…
Mon dieu, je voudrai vous garder de m’aimer.
Quel masque hideux pourrai-je jamais revêtir
Pour qu’un tel miracle s’accomplisse ?
Quelle bave vénéneuse devrai-je cracher
Pour atteindre moi-même…Malgré vous ?

Mais après tout, bave ou nectar,
Vous n’y voyez que du semblable !

Alors, espèce de Sale Gamin,
je viens te rejoindre sur la jetée,
On coulera notre vie, notre luxure ensemble
Sur ces grèves où plus jamais nous ne trébucherons,

Et d’ailleurs, même après tant d’années,
Qui peut dire sur quoi nous avons trébuché ?
Est-ce sur un corps, un pamphlet ?
Sur une femme assez gaillarde
Pour nous prisonnier ?
Sur un arbre souillé de la douce bave malléable
De ceux qui marchent en coin ?

Je sais que nous ne le saurons jamais
Parce que nous ne sommes pas là pour le savoir…
Peut-être un peu pour le dire…
Non, en regardant de plus près,
Je sais que c’est pour le dire,
Pour amnistier d’encore plus près
Les peaux d’oranges qui se trouvent encerclées…

Hymnes Déchirés - Sur les boulevards du buvard

Idem

II
Sur les boulevards du buvard



Je suis obnubilé par la solitude,
Celle-ci m’obsède
Et je pèse…
…Par des mots d’hébétude.

J’acquiesce aux boulevards,
Ils ne sont point lieux de crimes
Morceaux vendus, du lard
Mais bien plutôt l’occasion de cimes

Car aux boulevards, buvard,
Je me mêle, et m’entourloupe
Non, je ne déteins pas…
Je m’imprègne
Aux boulevards du buvard
Je regorge de rouge
Et rigole bien du orange-houblon

Je suis un Apache
Je chasse en mes terres…
Gila River au milieu
D’une sombre fausseté,
Eunuques désossés
Parfumerie ambulante de désirs virtuoses,
De rien du tout…

Je cherche : Cherchons !
« Mais tu es seul, maudit handicapé ! »
Oui. Certes. Et vous êtes plusieurs Toi
Alors que je suis mon seul Tu…

Hymnes Déchirés - Renaissance de la cruauté


24 Juin 2005
Matin après la tempête,
Au Viaduc Café

I
Renaissance de la cruauté


Sortir la tête de l’encre
Qui s’échauffe au soleil
L’encre maudite
Qui jamais ne s’effrite…
Peut-elle se cristalliser ?

J’ai parcouru les chemins détournés ;
Des derniers aux premiers—
Ma préférence n’a jamais tardé…

Je cherchais…
Surtout à m’enfuir
Pour éviter qu’on me trouve…
Comme toujours dans ces cas-là…

Aujourd’hui je me résorbe !
Je me suis rabaissé d’humilité…
Assez, je dis ! Fini !
Je me suis désossé, je l’ai dit,
Parce que je ne comprenais plus.

Maintenant, j’ai faim de nouveau
Mon rictus peut redevenir cruel…
J’ai été trop mièvre
Pensant qu’on me respecterai ainsi…
Je l’ai cru et me suis trompé.

Alors, assez, je dis !
Assez ! Qu’hurle le sang de mes démons :
Je quitte la douce demeure
Et me jette dans la rocaille de la rue…

Ah ! On m’a trop prit pour un enfant…
Mais j’ai la rage…
Et je suis assoiffé de seins et de cyprine,
Venez femmes ! vous frottez à un homme
Si vous ne craignez pas d’être soumises
A ces caprices brutaux et bucaux…

15 mars 2007

Kosack!


Soulevons fracas et tonnerres !
Rugissons, nourrissons-nous d’éther
Et allons par-delà les cimetières
Crier la vie et jeter des pierres !

7 mars 2007

ANANDA en ligne

Désormais des extraits de textes de la revue ANANDA sont consultables sur cette page...

Bonnes éruptions...

Soirée du 26 Mars 2007 à la Plage

Suite au succés de la dernière soirée lecture organisée le 29 janvier dernier au Café de la Plage,
l'Association Vers De Rage réitére l'expérience le 26 mars 2007, même heure, même endroit (20h30 au 59 rue de Charonne, Paris 11ième, pour ceux qui ne suivent pas...)
Il y sera présenté les nouveaux textes qui figureront dans le 4ième numéro de la revue ANANDA et qui seront, une fois de plus, accompagnés par les rythmes souvent endiablés de Kamel Tenfiche de l'O.N.B. (Orchestre National de Barbès) ainsi que de Mohammed Nasri, flûtiste de renom.
D'autres surprises sont à prévoir et
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En attendant, on se retrouve ici, régulièrement, pour de nouveaux textes et des infos.
Salud!

EDITO - La fleur de Lotus

A travers les styles et les textes qui sont proposés ici, les auteurs ont décidé d’engager sérieusement les hostilités contre la flasque tiédeur des littératures ambiantes qui ne savent danser – Et encore ! – que devant une caméra et qui jamais ne pensent, jamais ne poussent le Mot dans ses retranchements les plus lointains, les plus hostiles à la sourde logique des grammatistes, jamais ne l’utilisent comme l’intermédiaire excellent qu’il est, entre le mystère ineffable du monde et de la vie et la force et la démesure de l’esprit humain.
C’est tellement demander aujourd’hui que d’inciter à l’effort ! Que rien ne soit dur surtout ! Qu’on nous donne et nous redonne du Marc Levy ! A la pelle ! Parfait ! On n’a jamais vendu autant de livre ! La littérature va bien merci. Elle pue la mort mais elle revêt de belle parure et son maquillage imite, mieux que n’importe quoi d’autre, la vie… Les sens deviennent incompétents tellement leur usage est déprécié et les écrits d’aujourd’hui sont le miroir de ce constat. Rien ne permet de grandir l’âme du monde en nous, tout est réduit à une espèce de néant organisé par la science dans lequel fusionnent des particules incandescentes et incontrôlées. Mais c’est un risque que de voir ces particules contaminer l’ensemble des cerveaux ou, du moins, quelques-uns des cerveaux de ce monde. Risque que ne peuvent se permettent ni les dirigeants politiques ni les responsables des maisons d’éditions toujours plus près de leur exigence de « rentabilité » et toujours plus avares quant à leur goût.
Ananda prend l’autre parti (et aussi le parti de l’autre), celui de l’exigence et de l’effort, celui aussi d’une certaine cruauté face à la mièvrerie aseptisée des médias qui, bien plus qu’une tyrannie déclarée, permettent un contrôle aigu des êtres et de leur cerveau en provoquant et en entretenant la peur que le monde, en plein bouleversement, inspire à juste titre.
Chaque jour est à transformer. Ne jamais oublier ça. « Lorsque l’intensité est la mesure des actes quotidiens, la quotidienneté disparaît. » (M. Moreau) Et si la quotidienneté disparaît, avec elle trépasse la médiocrité et l’aigreur du train-train d’ban-ban où s’écoule et se déverse une masse toujours plus abrutie de travail et assoiffée d’une liberté en pension complète à 300 euros la semaine. Nous vivons dans une amnésie salutaire qui nous fait oublier que sous la fleur de lotus, dix tonnes de boue s’accumulent, qui la rendent encore plus sublime.
Et le Verbe est cette fleur de lotus, il est une géologie inversée, remontant à la surface pour tenter de la comprendre ; c’est aussi le messager viscéral des intestins à la fascination scatologique de l’humain. Ananda, enfin, je le redis, travaille à cet effet, sur le Rythme, la Mélodie et le Style que les mots contiennent parfois et qu’ils devraient incarner, toujours.
Pour changer la vie, comme disait l’autre…


C.L. Octobre&novembre 2006

Pour en Découdre par Nathalie Rousset

Ce qui a pu s’écrire avant la Puce :
[…] 2006, l’histoire respire, l’auteur vit. Ses propos sur des vieux démons concernent Corie. Mai 2006 adresse un clin d’œil aux récits de tous les temps, à l’écrivain l’expansion réjouie. Mois de mai invite les inspirations plus profondes à sa table d’écriture.
La vie pullule encore à ce moment-là de bourgeons existentiels. […]


_ _ _ _ _ _ _


Avec tes vieux démons


Il y eut les heures assujetties où l’âme spoliée – elle rampait pour plaire alors – appartint au joug d’une traîtresse amitié. L’âme ne voulait pas être seule.


A la suite de ta bêtise d’enfant -ta première erreur d’adulte-, il y eut à certains vêtements de douloureux souvenirs mêlés. Ce fut avec l’amie que toi, émule en sa méchanceté, tu les achetas, pour toi et surtout pour elle, grâce au vol du carnet de chèques de tes parents. L’acte stupide parsema vite ses preuves d’existence: ce jour-là, tu te réveillas hors de ton carcan. S’acheva en avril 1995 la promenade soumise de ton individualité en moignons.

Dans ces vêtements d’une garce issue, peine, rancœur et dégoût te dévorèrent longtemps. Pourtant, tu n’en as jamais porté un. Mais ton regard revêtit ces antioripeaux et ainsi fus-tu chargée de tels ressentiments.
Après l’épisode, les heures où tu te retrouvais seule dans la maison familiale, tu t’empressais de les étaler sur le sol de ta chambre, et à sa sortie continuait l’exhibition jusqu’au bord de l’escalier. Tu observais la longue chaîne bigarrée formée par les six bouts de tissus: aucune magnificence dans ces vêtements neufs. Tu pleures. Tes poings affrontent les murs en plâtre. Des coups de pied mettent parfois en lambeaux ton sol tapissé dont quelques pièces chutent dans l’escalier.

Jamais plus tu ne reparlas au mirage amical. Tu venais d’avoir quinze ans.

Quelques mois plus tard dans un autre couloir en plâtre. Un après-midi pluvieux de rentrée des classes, une dizaine de minutes, tu écoutas sa voix percutant le silence ému de la tienne. Tu ne décelas pas une once d’honnêteté et ne comprit pas sa démarche. Tu reçus des pièces supplémentaires pour ta chaîne de mélancolie. Elle quittait la région: tu ne l’as jamais revue depuis!

Tu partit en terres ignorées de cette Cruauté.

Suite à découvrir dans le format papier d'ANANDA disponible ICI...

Des fleurs à la surface par Yann Caudal


Un jour, j’ai dit : basting ! à mon cœur qui déraille.

Je ne peux plus faire l’effort de vous servir. Je ne me serais jamais imaginé devenir l’autre que je fuis. Vous comprenez ? Vous vous imaginez autre, peut-être, dans l’éternité du mensonge ? Je vous aimais depuis longtemps. Mais rien. Rien qu’un appui que l’on désigne béquille. Et puis ma face ?
Réponse : « des fleurs à la surface ».
J’ai employé tous les grands maux pour te parer de ma blessure. Je me suis employé à l’écriture comme on attend le signe d’un ami. J’ai cassé la gueule à toutes les putes de mon esprit. Je me suis montré fort. Je me suis déridé comme mon front ; trop glacé, sait-on jamais ? Je puis vous dire que je me suis fais du souci pour moi. En effet, ce que je ressentais pour vous, était à la fois de l’amour et du viol.
Où avais-je la tête ? sans doute dans d’autres aventures…

Un jour, je te dirai, je t’aime....
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Sans retour (Le plaideur II) par David Falkowicz

Il y a si longtemps que je suis ici... La captivité m’a plié, brisé, anéanti... J’ai épuisé le cercle des ressources humaines... Je ne sais plus vraiment quel crime j’ai commis. Sur un vieux journal, j’ai gravé des mots tordus, abîmés par des accès de haine. J’ai essayé de compter les jours, les mois, les années, mais dans l’obscurité de ce lieu j’ai fini par perdre la notion du temps : un jour, un mois ou une année, quelle différence maintenant ?

Au fond de ma cellule s’est interposée entre le monde et moi une vitrine d’acier, indestructible, qui me renvoie les reflets de mon passé. Ce passé s’est aujourd’hui détaché de moi. Les retours en arrière, les introspections ne signifient plus rien. Mes repères avec le dehors ont subi avec le temps des modifications irréversibles. Je touche à l’irrémédiable, et j’accepte avec sang-froid ce nouvel état de choses. L’histoire de chaque individu est faite pour être bousculée, et doit déboucher sur de sévères remises en question. Remise en doute généralisée et radicale à l’endroit de l’ordre du monde. L’important n’est donc plus de répondre à la question « Qui suis-je ? » mais plutôt « Que suis-je devenu ? ». Après de longues années d’isolement, vécues dans le désespoir et l’angoisse, j’ai compris qu’il ne pouvait exister aucune autre consolation que celle que pouvait m’apporter ce devenir.


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Engeance tannée… Ode (masquée) au Picon-Bière… Par Charles Letellier

Véhémence est plantée devant le bar. Elle est Hallucinée. Elle se tient sur ressort. Elle est prête à bondir. Elle pourrait se détendre. Il y a la Coupe devant elle, pleine, dégoulinante de l’intérieur, contenant réduit de flux bourrus et spasmodiques. Seule la Coupe ressort, seule elle a le don de la mouvance, du pétillement tellurien qu’elle promet et dont elle honore ceux qui osent s’y tremper. Véhémence n’est point. Elle n’incarne pas ses propres gestes. Elle semble s’être dispensée des exigences brunes dont elle se veut le réceptacle. Les faire entrer en elle pour parvenir à déjouer les mécanismes incertains promptes à détourner les jours. Oui, c’est cela. Elle ne quitte pas des yeux la Coupe de l’anti-Graal qui explose silencieusement devant elle. Pas d’années-lumière, s’il vous plaît ! Des secondes incandescentes ! C’est ce que se dit Véhémence, en manque d’hallucinance gutturale. Elle ne s’y résout pas, veut retarder l’humectation révélatrice en faveur d’une sécheresse muette. Elle ne sait pourquoi. Une partie d’elle complote contre l’autre. Il lui faudrait pourtant faire le pas, prendre une autre forme, se couler dans mille flacons, verser dans le scabreux, se répandre en hérésie et faire des geysers de ses blasphèmes. Elle voudrait glisser parfaitement, ne plus rien dire, être silencieuse, se taire sur son affaire et exécuter sans bruit le travail de la défiance. Tronquer les délices flambés de la Véhémence Hallucinée pour les lourdes fadeurs d’une danse pesante. Peut-être le faudrait-il mais son sang l’en empêche, quelque chose grince, le chaos des choses sûrement, ou bien... la terreur du reliquat.
De nouveau, elle se mire dans la Coupe intacte. Elle s’y voit tordue, insupportable, brillante, cruelle… Monstrueuse. Et dans l’orbe tannée de celle-ci y découvre l’avenir-cristal de ce qui l’attend : les coups, le verre se sachant incapable de rebondir et qui, pourtant, tentera l’expérience tout à l’heure, le sang rouge des dommages collatéraux. Elle espère un moment, se prédisant la brise en contre-point de la tempête, la flemme bâtarde et non la démesure grandissante, la douceur d’un papier corolle et non l’exubérance d’une page en feu. Elle se trouve à la charnière. Elle, Véhémence-à-moitié, est gond rouillé.....

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NO MAN’S LAND CIRCUS par Lionel Blot

– Dire qu’il fallait que tu t’appelles Eléazar.
Ça m’a réveillé en sursaut. Elle s’est mise à parler brusquement, elle n’avait pas prévenu, chez elle tout est dans la rupture de ton, l’effraction du sommeil, la dislocation du corps. Il faut entendre sa voix refluer, le point d’intonation ubiquitaire, son timbre retourné, sa façon d’articuler à l’envers. Ici, la conscience se met à vaciller légèrement, le temps d’un vertige, celui d’éprouver nettement la sensation d’une impossibilité géographique, d’une contradiction interne à toute géométrie, comme si les pôles s’inversaient dans l’espace. Elle avait cette gravité, cette vibration de basse qui semblait percer d’un cercueil de terre, et en même temps comme une légèreté musicale, une luminosité tombée d’un astre et restée là en suspension. J’ai ouvert les yeux, elle était accoudée sur le lit, son visage penché sur le mien, je ne me souvenais plus vraiment d’elle mais une ombre familière glissait sur son visage, quelque chose qui portait la marque d’amours défuntes, les stries de ces souffrances et de ces joies qui déchirent les cordons nerveux et parcheminent la peau. Dans son regard : l’Histoire. La scène primitive et le dénouement tragique. J’ai demandé :
– Tu m’emmènes en voyage ?
– Eh oui.
– Aucun billet retour ?
– Pas sûr. Tout dépend de toi...

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La vieille paire de grolle à mi-chemin. Biographie Poétique, par Slimi Ben Ahmed

En Amnios - le pays d'où je me perfore à coups de mine graphite -,
l'océan est comme un monarque, un diamant; il n'entend que celui
qui ne le chante pas.
Je cherche constamment à l'aimer dans l'espoir d'avoir grandi, changé,
tout simplement; et s'il se mettait à me plaire tout à coup?
Je suis comme une vieille paire de grolle, un homme qui doit prendre
des gants pour se laver l'âme de sa souillure.
Ici c'est la nuit, un jardin obscur et le flamboiement vert de la nature
au-dessus de tout ne figure à nul inventaire.
Posé sur l'écueil, le noir océan me crache dessus d'un ressac!
Pourquoi et comment en suis-je arrivé à ce nulle part?
La brûlure de l'eau s'écoule sur ma joue comme du temps où j'aimais transpirer mes sentiments.
De ce crachat, il va falloir en retirer l'essence nue…


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Avant que ça nous démange ! par Nathalie Rousset

L'aurore accueille un homme endormi aux lèvres qui sourient, et le regard de Corie.

Elle se lève et s'enferme dans la salle de bains. Elle s'approche de la fenêtre et son regard s'embarque sur un papillon aux ailes bleues, haut au-dessus de la tourbe. Le rideau baissé, nue , elle se lave.

Après l'amour, les pensées de cette femme seule s'échappent du lit, de l'autre. Elles construisent une nouvelle civilisation dont les hommes exhibent un corps différent. Assise sur le rebord de la baignoire, Corie sourit devant la glace…
Les narines verraient couler l'urine… La bouche évacue, le temps d'une toux, les rejets du réel derrière. Le nombril féminin ouvre la voie vaginale.
Corie imagine la vie corporelle de sa nouvelle civilisation, le nouveau puzzle des relations sexuelles d'un homme et d'une femme.

Elle déloge le loquet et les orteils gauches poussent la porte. Ses yeux entrent dans la chambre. Ils s'attardent sur le sourire de l'homme endormi, Émeric. La nouvelle civilisation devenue figures lilliputiennes danse sur le ventre nu d'Émeric. Ses pensées envahissent l'air avec ces êtres méconnaissables. Ces corps inconnus amenuisent le dire possible du sien.

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Le plaideur par David Falkowicz

Lors d’une audience publique du Tribunal Général de Lyon, il y a quelques années, un témoin a pu relever par écrit la totalité d’une plaidoirie concernant un homme, condamné à la prison à vie, dont le crime n’a jamais été élucidé. Du fait de son refus catégorique de faire appel à un avocat, le jugement de cet homme fut sans issue. Il s’agissait bien là d’un « jeu de massacre » - ainsi qu’on l’a qualifié dans plusieurs journaux de l’époque - dont le déroulement, désespéré, a fini par prendre un caractère inattendu : dans sa défense forcenée, le mystérieux individu a réussi à mobiliser l’attention d’un auditoire fasciné. L’apparente cohérence de sa déclaration, entrecoupée d’inquiétants moments de démence, s’est imposée à l’auditoire sans la moindre interruption. De cet événement, rapidement étouffé par la presse, il n’est resté que quelques feuillets incomplets, restitués ici, dont le début et la fin ont été perdus.


... de ce beau scandale, je ne plaiderai pas coupable. Je resterai injustifiable : là seulement sera ma véritable justification. Hé bien messieurs, il est temps maintenant de m’écouter : je vais d’abord commencer à dénoncer vos fautes ; et les rendre plus graves par votre lâcheté. Vous tenez aujourd’hui le beau rôle, mais le temps me rendra raison. Mes mots semblent gratuits et ne pas blesser : ils braveront pourtant de leur élégance vos mines insatisfaites. Je me ferai un devoir de ne pas vous contredire, mais prenez garde à mes humeurs changeantes : elles sauront trancher vos interrogations avec insolence. Votre conscience va maintenant s’incliner devant mes révélations...

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Non merci, mais je ne fus plus ! par Yann Caudal

Le Vétéran et le Frétillant-Solennel.
Le Vétéran : Ou bien ?
Frétillant-Solennel : Ou bien quoi ?
L. V. : J’avais envie de voir sa synagogue. Gogues en chapelets. Replet-charcuterie. J’étais écrigraillon.
F.S. : (Un temps). J’écris tout du long de la vie.
L.V. : La sienne ou bien ?
F.S. : Je veux dire dans la vie. La mienne à elle.
L.V. : Ah oui comme on décrit une vie, ou bien ?
F.S. : Je n’ai que faire de critiquer sa vie. Je me nourris de son absence. Je ne suis pas présent. Son temps m’est compté. Vous ne voyez pas que je suis en face de quelqu’un ? Je ne suis pas ivre, non. Je ne serais plus jamais ivre. Lui écrire tout de même ! Douteriez-vous de mes oraisons ?
L.V. : Ou bien, raison.
F.S. : Vous avez toujours raison. C’est agaçant votre service. Vous servez, vous avez raison. Vous servez des verres et vous avez encore plus raison ! La raison vous donne des phrases et vous continuez à servir pour avoir tort, ou bien je me trompe ! La guerre ne vous a pas suffi ? Je ne vous comprends plus.
L.V. : N’est plus, ou bien ?
F.S. : Non, elle est.
L.V. : Jument bréhaigne sans enfant s’ennuie tout le temps. Vous l’aimiez ou bien ?
F.S. : (un temps) Qui vous a appris cela ? Quand vous étiez soldat en Serbie ? Voïvode de l’enfer. Combien de bouteilles par jour ? Combien de fois vous êtes-vous mutilé ? (Un temps). Elle ne voulait pas d’enfant. C’est autre chose. Vous saviez ?

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L’élève par Charles Letellier


Le choc se produisit dans l’obscurité inquiétante d’un soir. Il n’eut pas la forme d’une détonation à proprement parler. Ce fut un bruit, certes, au début, mais continu, discret et insoupçonnable, un glissement reptilien parmi les feuillages d’un automne qui n’en finissait plus. Personne n’y prêta attention au début parce que, à vrai dire, il y a des bruits, comme certaines odeurs, d’une subtilité trop grande et que ne peuvent saisir d’habituelles oreilles et d’ordinaires nez.
120 garçons sont concentrés, là, dans la salle E 700, la plus grande. Ils respirent tous. Tout est silencieux. Imposé au silence. Forcé d’obéir à la Loi Disciplinaire. Quelqu’un au milieu de la salle est assis sur une estrade. Parfois, il se lève et parcourt les allées muettes. Certains effrontés en profitent pour lancer des boules de papiers, des crachats, des magazines. Les murs suent du Dioxyde de Carbone exhalé des 120 corps respirant et attablés, des 120 bouches aux haleines ingrates que les sucs gastriques, appelés par la faim, rendent suffocantes. Les murs sont gras et collants de quarante années de similaires assauts quotidiens. Le carrelage en est devenu orange, la peinture blanche s’est écaillée, il y a longtemps déjà. Tout ici n’est que moiteur et touffeur mais rien ne permet de rappeler l’existence d’un quelconque tropique.
Il fait nuit dehors, évidemment. Comment pourrait-il faire jour ici ? Il n’a jamais fait jour ici, le soleil se le rappellerait. Il en aurait pâli, d’un tel spectacle.

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ANTIPHYSIQUE DU CORPS par Lionel Blot

Regardez-les tomber… C’est drôle… Fauchés par leur biologie… Les ailes coupées au milieu d’un vol astral, sinistrés léthargiques sur un récif perclus… Rapatriés d’urgence en sommeil… La vie n’est plus qu’un vieux rogaton qu’ils bouffent peut-être dans un rêve qu’ils oublieront. Et voilà, ça leur reprend, une fois par jour, à la même heure, un peu avant, un peu après, chacun son rythme, le monde se sédimente et s’assoupit. Ronflements satisfaits bouche ouverte mémoire gourde. La narcolepsie siège à la Cour, elle dicte sa jurisprudence, elle en impose dans sa toge rouge, l’hermine en bandoulière, Chronos et Thanatos brandis en étendard, tout le monde se tait, rien à dire, on obéit.
Faites donc l’expérience. Regardez-les tomber, vous êtes si belle, je voudrais vous voir rire. Il paraît que vous ne voulez pas mourir. N’est-ce pas ? L’ombre du doute vient de glisser à l’orée de votre front. Non ? Vraiment ? Bien.

Alors écoutez. La nuit sera longue. Sur chaque fibre que vous ferez vibrer, la volupté s’attachera sans embarras. Il vous faudra des nerfs d’airain.


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LES FEMMES DES AUTRES, par David Falkowicz

Une chanson des Smiths résonne dans un café du Vieux-Lyon. Son écoute m’émeut, me rend silencieux. D’une écriture lente et rugueuse, je noircis quelques pages de mon carnet, et me résous à rendre compte, à bout portant, des fluctuations de mes pensées. Il fallait bien l’éclat vibrant et sarcastique de la voix de Morrissey pour me décider à faire un retour sur mes propres déclinaisons - celles du verbe, mais aussi de mon âme...
Je m’essaie à débarrasser ma peau de ses lambeaux de peur, de ses scories volcaniques qui m’oppressent et m’engagent.
Le temps brûle ; son écoulement est un doux supplice. Je suis agité de légers soubresauts. L’amour se dissout dans l’air de la nuit.
Je recentre mes défaites et mes victoires, et comptabilise les parties manquées, les erreurs de parcours : les renoncements, les lâchetés, les effronteries. Mes soirées s’avèrent ainsi inépuisables, et achèvent des journées déstructurées, des journées vacillantes à traîner le cœur bouillonnant de nouvelles conquêtes....

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MINES par Lionel Blot

Toujours en vie ?... Oui… Je n’aurais jamais cru… Mes mains, ma nuque… Légère pesanteur crânienne… J’ai dormi comme une brute… On recommence, donc... Levé de bonne heure, cet après-midi… Aussitôt les vertiges, le vacillement intérieur… Ce sont les vapeurs de soufre inhalées tard la nuit… Cafés noirs... Quatre, cinq, six…. Ma main se tend, prompte à accueillir le mot... Pas tout de suite... Savons abrasifs, eau tiède, glacée, brûlante… Je m’ébroue... Voilà, je brille en surface... On peut y aller ? Bien sûr.
Infimes secondes qui me séparent du clavier, et qui opèrent, là, le transit organique de la connaissance, du silence mondain à la conscience cryptique, de l’absence de soi à la parole souterraine, du contingent, de l’inessentiel, du non-avenu, du non-être, à l’écriture. Tremblements parcourant mes nerfs depuis le cervelet jusqu’aux doigts. J’y suis. Ecran blanc. Contemplation d’un vide.

Machinalement, mon doigt frappe au hasard une lettre ; une porte s’ouvre sur l’obscurité. J’y vais ?... Oui, mais c’est un puits… Une chance de revoir le jour ?... Hm, voyez-vous, le grisou, on ne sait jamais... Aucune garantie ?... Si, parce que ça parle, au fond… Tant mieux, je ne demande qu’à entendre... Etes-vous cynique ou gigolo ?... De votre point de vue, peut-être… Enfin, je veux dire, l’esprit n’y tiendrait pas, comprenez-vous, il y a des vérités qu’on gagnerait à taire…


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A quelle heure est le prochain train ? par Yann Caudal

Donc c’est mon tour à présent ? Bonjour, voilà, je voudrais juste, si c’est encore possible, un billet pour le retour s’il vous plaît. Uniquement le retour, l’aller je l’ai déjà… Ma destination ? Ah oui ! Eh bien c’est-à-dire… Pour… Tout de suite, voilà !... Pour où ? Mais pour tout de suite je viens de vous le dire… Comment ça : « pas une destination ! »… Excusez-moi mais je n’ai pas dû formuler clairement ma demande, j’en suis absolument désolée. Vous me troublez peut-être, allez savoir… C’est toujours impressionnant de prendre la parole, surtout quand on a attendu longtemps avant de parler. Avec tout ce monde qui fait la queue. Mais puisque c’est mon tour. Que je suis là, comme ça, devant vous qui tergiversez pour je ne sais quels détails… Je peux vous paraître étrange mais c’est tout le contraire. Je me sens contemporaine voilà tout…
Ah oui ! Reformuler tout de suite ma demande avant que je n’oublie pourquoi je suis venue ici. Donc, « A quelle heure est le prochain train s’il vous plait ? » C’est mieux comme ça ?... « Parti » dites-vous ? Là je crois que vous ne me prenez vraiment pas au sérieux. J’ai l’habitude vous savez. Passons… Comment ? Vous avez l’air de croire que c’est moi qui se joue de vous maintenant ? Certainement pas ! ....

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Lettre ouverte… Par Slimi Ben Ahmed

As-tu déjà senti te mordre les chiens fous de la patience?

-Dilatée la rétine- ton regard s'étonne. N'as-tu rien compris de cet ubiquiste glossaire?
Étiolé de mes hier, sorti de la fosse -quotidien-, j'exhorte
aujourd'hui… cette lettre.
Ne vois-tu pas que la patience se plaît à mystifier les hommes?
De ce qu'elle est de propre, a fait de nos villes des nécropoles - terrain de jeux pour chiens fous tenant dans leur gueule la branche de l'être-.
Comprends qu'elle saccage dans sa dualité déchirante, l'impatience n'est que son reflet arraché aux miroirs.
La patience est une vertu en carton qui se met à l'aise, comme on desserre l'étreinte aux entrailles de la ceinture de l'ineffable consistant....


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Brûlures. Introduction à La Fausse couche de l'homme par une cérémonie* supplémentaire de la peau: le feu, Par Nathalie Rousset

Brûlures. Introduction à La Fausse couche de l'homme
par une cérémonie* supplémentaire de la peau: le feu

Depuis quatre années, j'écris l'histoire de mes peaux…
Elles tombèrent, tombent et tomberont de mes mains et de mes pieds, arrachées par petits morceaux. Je les conserve dans des bocaux. Mes six bocaux concentrent dix années de mutilation. La biographie de mes peaux se prénomme La Fausse couche de l'homme. Et si aujourd'hui elle se poursuivait en mots palpables…
En octobre 2001, quinze jours ont donné naissance aux cinq pages dactylographiées qui demeurent le squelette inchangé de mes pensées de création livresque. Depuis, La Fausse couche a survécu dans des esquisses de gestes : mes peaux tombent plus souvent mais sont abandonnées par terre.


Mon livre juxtapose des scènes dans lesquelles des peaux accumulées œuvrent vers une création autre qu'humainement épidermique. Elles construiraient l'épiderme de la Terre. Nous regarderons le puzzle achevé des peaux et nous porterons dans nos mains un globe terrestre à taille humaine. Ainsi, le corps d'un homme devient plus véritablement une miette de l'univers.
J'écris mes peaux, je les fais être une œuvre plastique racontée puisque mes mots ne savent pas exploiter le monde des hommes pour leur offrir leur fidèle miroir romanesque et être face à eux un écrivain reconnu.

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Sur le fil du rasoir…par Charles Letellier

Tout n’est pas parti d’une urgence.
Mille choses se sont créées dans le chaos prolongé des millénaires avides de lenteurs. Particules après particules, l’infiniment petit s’est peu à peu projeté vers le grand, incalculable et follement dépensier en matière de temps. Inéluctable… Quel beau mot ! Il n’y a pas vraiment d’urgence, là-dedans… Ca serait plutôt le contraire… Inéluctable, comme l’explosion de l’univers et la perte des dents. Comme l’apogée du déclin en secousses merdeuses. On s’amuse comme on peut dans l’inéluctable. Après tout, il en faut de la patience si on s’attaque à l’urgence… Et c’est vrai qu’il faut aussi pas mal d’urgence pour se décider à causer avec la patience…

Tout est un peu là.
Sur ce dérisoire fil du rasoir, lieu de rencontre forcené des plaques continentales et océaniques, mobilité tellurique à la dérive, il y a comme un moment de silence qui se fait. Dans l’œil de l’urgence, le temps s’est arrêté. Plus de vitesse, de pression, de stress. Tout s’est dissout. De terribles forces laissent la place à un flottement qui se suffit à lui-même. Oui, ce flottement… L’urgence est alors un mélange de patience et d’inexorabilité.

J’aime cette urgence de la Terre. Plus que tout. Le long labeur du fond de la vie, ses « atomes avides qui travaillent des déserts… ». Notre époque, passée maîtresse en l’art d’évider du Sens les mots, confond beaucoup trop « urgence » et « vitesse ». La première n’a...

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